Un bref portrait de Marguerite YOURCENAR par Dominique Rolin

 

« J’en (1) suis très fière, d’autant plus que j’y succédais à Marguerite Yourcenar que j’avais rencontrée une ou deux fois pas plus, et qui était un personnage assez extraordinaire. Je l’avais vue pour la première fois chez Gallimard, lors d’un cocktail donné en son honneur pour la parution de L’Oeuvre au noir. C’était une femme incroyable, une sorte de gendarme femelle qui avait, paraît-il, été très belle dans sa jeunesse, d’une façon un peu masculine, du genre charpenté. Elle m’avait envoyé un de ses livres autobiographiques que je n’avais d’ailleurs pas tellement aimé. Mais elle était passionnante pour son intelligence, sa liberté, sa culture. Elle était tout le contraire de moi, je me faisais l’effet d’être un farfadet timoré à côté d’elle. C’était quand même une femme impressionnante ! Mais je n’aurais pas voulu lui ressembler. Elle m’avait dit qu’elle était contente de me rencontrer, ce qui m’avait éblouie. Je n’avais pas répondu bêtement « moi aussi ! ». (Rires) Elle était aussi fascinante par son orgueil, sa volonté, son athlétisme intellectuel et, surtout, par son besoin de dominer… Yourcenar tenait ses origines belges à distance, me semble-t-il, au lieu de s’en délecter comme moi. »

Dominique ROLIN, « Plaisirs« , Paris, Gallimard, 2002, pp. 72-73 (Collection « Folio »)

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(1) Il s’agit de son entrée à l’Académie royale de Belgique.

"Je dis qu'il faut apprendre le français dans les textes écrits par les grands écrivains, dans les textes de création ou chez les poètes et non pas auprès de documents qui portent déjà le rétrécissement du sociologisme, le rétrécissement des médias." Michel HENRY